Chapitre 15: Reminiscence
Plusieurs jours étaient passés dans la petite ville de Monte Vista.
Ce soir-là, Janice et Zeus étaient absents. Peter avait proposé à son voisin et collègue de venir à la maison disputer quelques parties de jeux sur PlayStation mais aussi se mater un ou deux films si le cœur lui en disait.
A présent il essayait de convaincre sa sœur de descendre les rejoindre.
- Et j'explique comment ça ? demanda-t-elle en désignant son visage encore marqué de coups. Le coup du "je suis tombée" ne vas pas marcher à chaque fois Peter.
- Fais comme tu veux, finit par dire son frère en rendant les armes et rejoignant Benjamin dans le salon.
Après plusieurs jours, Benjamin avait réussi à s'acclimater à la vie à Monte Vista. Assez étonnement, il avait réussi à se faire un ami en la personne de Peter Alpha. Par ailleurs, ce dernier l'avait invité à une soirée jeux vidéo, étant la spécialité de Benjamin, ce dernier avait accepté. C'est donc ainsi qu'il se retrouva dans le salon des Alphas.
- On se commande des pizzas ou pas ? demanda-t-il quand Peter revint dans la pièce
- Yep mais ma sœur ne veut pas descendre pour l'instant, dit-il en haussant les épaules. Tu veux quoi ? demanda-t-il tout en attrapant son portable et composant le numéro de la pizzéria du coin.
Benjamin haussa les épaules. A vrai dire, il trouvait la sœur de Peter plutôt bizarre
- Une Hawaienne bien sûr, dit-il pour répondre à son ami
- Ok, donc 2 hawaïennes et me dis pas non on a toute la nuit ! 2 chèvres et ma sœur... Merde... J’ai oublié, dit Peter tout en récapitulant ce qu'il devait demander au livreur. Il regarda son ami avec des yeux ronds, ah oui ! Saumon.
Il appela et passa commande.
- Bon... On en a pour 30 min avant d'être livrés... Un p’tit call of en attendant ? proposa le brun avec un sourire.
- Avec plaisir ! dit-il en souriant également
Peter lança la console et le jeu et tendit une manette à Peter.
- Bière ? demanda-t-il en se levant avant que la partie ne commence
- La question ne se pose même pas.
Il revint avec deux bières et lança du même coup la partie. Peter était surpris d'avoir autant en commun avec le jeune homme.
- Bordel tu m'as sauvé la vie mec ! dit-il lorsque son ami snipa un ennemi non loin.
- De rien ! C'était plutôt facile
Au même instant la porte d'entrée sonna.
- Pizza ! s’exclama Peter en mettant la partie en pause pour aller ouvrir.
Il paya la commande et revint avec les boîtes.
- À table ! dit il les yeux pétillants en les posant sur la table basse.
- Eh bien, c'était rapide !
- Marco est toujours rapide quand c'est moi ! Ch'uis un client fidèle, rit-il
- Je vois ça !
Peter sourit et mit 3 des pizzas dans le four pour les garder chaudes. Puis il ouvrit les boîtes et pris une part de pizza dans laquelle il mordit allègrement. Le chèvre commença à couler de pizza brûlante et Peter ouvrit grand les yeux.
Clio depuis sa chambre entendait les deux garçons rire. Elle les enviait mais préférait ne pas se montrer. Comment expliquer les coups sur son visage ? Les bleus que l'on devinait malgré ton t shirt à manches longues. Elle ne savait pas. Et son frère qui ne comprenait pas, ou faisait semblant de ne pas comprendre.
Elle enviait la façon qu'il avait de rester malgré tout normal en présence des autres. Elle ne savait pas comment s'y prendre. Elle s'assit sur son lit dans la pénombre de la pièce. Elle sentait son estomac gargouiller mais ne pouvait pas descendre tant qu'elle n'était pas sûre qu'ils soient ou partis ou trop occupés à jouer pour remarquer sa présence.
Les garçons jouèrent jusque tard dans la nuit, tellement tard que Peter proposa à Ben de rester dormir. Le jeune homme après une hésitation et accepta. Il n’avait pas pour habitude de dormir chez les autres, mais il s’était dit que pour une fois cela serait une bonne idée. Peter avait donc déplié le canapé-lit et donné un pyjama à lui.
- Bonne nuit et si tu as besoin de quoi que ce soit, tu sais où me trouver ! dit-il.
Benjamin hocha la tête et après s’être changé, se laissa tomber sur le lit.
Clio qui attendait dans sa chambre entendit son frère monter et passer par sa chambre pour se brosser les dents avant de venir lui déposer un baiser sur le front, comme il le faisait chaque soir avant d’aller dans la sienne. Elle attendit cinq bonnes minutes pour être sûre qu’il ne se relèverait pas avant de se lever et de descendre sans bruit. Elle s’avança dans l’obscurité de la maison et n’alluma que la lumière de la cuisine lorsqu’elle entra. Elle attrapa sa boite de pizza et soupira de soulagement en voyant que son frère avait pensé à lui garder une part de chacune de leur pizza ainsi que deux de saumon. Que les dieux en soient remerciés, il avait eu deux sous de jugeote ce soir. Elle commença à manger lorsqu’elle entendit du bruit dans le salon. Elle se figea et la panique la gagna lorsqu’elle entendit… Benjamin murmurer son prénom. Son cœur s’emballa que faisait-il là ? Il n’était pas censé resté dormir ! Comment allait-elle s’expliquer ? Affolée elle tenta de se mettre dans l’ombre… mais trop tard.
Benjamin avait été réveillé par la lumière, il pensa que c’était Peter qui revenait pour une raison inconnue, mais le pas était trop léger. Il en avait conclu que c’était surement la sœur de Peter… Clio. Voyant qu’elle ne partait pas et entendant un léger bruit dans la cuisine, il se leva intrigué.
- Clio ? appela-t-il une première fois en s’approchant.
Il vit la jeune femme se raidir mais surtout… les coups.
- Putain…Clio ! Il la vit essayer de se cacher en laissant tomber la part de pizza qu’elle allait manger dans sa boite. Ses bras étaient couverts de bleus, et son visage… mon dieu, elle avait l’air de s’être battue… ou fait battre. Il reconnaissait ces blessures. Qui t’as fait ça ? demanda-t-il. Passant soudainement au tutoiement avec la brunette.
- P-personne, je… je suis tombée dans les escaliers… bafouilla la Muse avant d’avoir trouvé une excuse plus correcte.
- Et moi je suis la reine d’Angleterre, lâche Ben sarcastique. Il la regarda, elle était vraiment bizarre mais si elle se faisait battre, cela expliquait qu’elle fuit tout le monde comme la peste.
Clio était mal, très mal. Si son père apprenait que quelqu’un l’avait vu comme ça… il ne la tuerait certes pas mais réussirait à lui faire pire pour assurer sa survie. Et c’est cela qui lui faisait peur. Elle resta dans l’ombre espérant qu’il parte, elle bafouilla
- Que fais-tu ici… je…tu n’es pas rentré chez toi ?
- Ton frère m’a invité à rester pour la nuit.
Il regardait Clio, elle avait l’air d’un petit animal effrayé, que ne donnerait-il pas pour la rassurer ! Lui dire qu’il savait ce qu’elle ressentait. Sauf qu’il ne savait pas quoi faire. Alors il fit pragmatique.
- Assis-toi. Je vais nettoyer ça.
- Non, c’est bon. Ca a déjà été fait… je… je vais te laisser, pardon de t’avoir réveillé, dit-elle en commençant à s’éloigner sans avoir mangé un seul morceau.
- Non, reste, mange.
Clio hésita avant de finalement prendre sa pizza et s’asseyant à table de manger doucement. Benjamin s’assit face à elle. Il avait une étrange impression, comme si la voir manger aussi doucement le visage couvert de blessure lui rappelait quelque chose… Un souvenir fugace. Mais, elle semblait alors beaucoup plus jeune. Il cligna des yeux, ayant l’impression de voir un mirage.
- J’ai comme une impression déjà vu… murmura-t-il
Clio se figea légèrement mais continua à manger. Son cœur battait plus vite, serait-il possible que ce soit lui ? Son Benjamin.
- Comment est-ce arrivé ? C’est ton père n’est-ce pas ?
Elle le regarda incrédule, trop choquée qu’il ait de suite trouvé la vérité alors que tant d’autres avant lui s’était trompé. Tellement qu’elle en oublia de répondre.
- Je prends ça pour un oui, son regard se durcit, tu ne peux pas le laisser te faire ça Clio.
- Comment as-tu… ?
- Deviné ? Ton frère t’aime trop pour lever la main sur toi, et ta mère est en fauteuil je ne vois pas comment elle aurait pu te frapper là. Le seul qui me semble trop « parfait » c’est ton père. Et j’ai des doutes depuis un moment…
Clio avala sa part de pizza.
- Comment ça ?
- Le soir de la réception, j’ai eu l’impression d’entendre comme un bruit... d’un corps qu’on frappe et puis, les cris chaque soir de pleine lune… Le garage est peut-être insonorisé mais quand tu es dans la maison...
- Tu étais à la maison ce soir-là ? demanda-t-elle paniquée
- Oui, ton frère avait oublié son portable au boulot… je le lui ai ramené… et je peux te dire que les cris que j’ai entendu en redescendant de sa chambre… il secoua la tête, qu’est-ce qu’il te fait ? Et ne me mens pas.
- Je ne peux rien dire…. murmura-t-elle en fermant les yeux. Elle se mordit la lèvre, il en avait déjà tellement découvert… Si son père l’apprenait… Tu ne dois parler à ça de personne.Tu n’es pas censé savoir, tu dois faire comme si tu ne savais rien… elle semblait paniquée et cela alerta Benjamin.
- Pourquoi ? Je ne vais pas rester sans rien faire alors que ton père te frappe ! dit-il soudain en haussant la voix. Comment pouvait-elle rester ainsi à prendre des coups sans rien dire ? Depuis combien de temps cela durait ? Il avait l’impression de le savoir, que cela avait quelque chose en rapport avec la mère de la jeune femme mais il n’en n’était pas sûr.
- Tu dois. Sinon il te pourrira la vie… à côté de ça les Enfers te paraîtront être le paradis…
Benjamin fronça les sourcils, elle s’exprimait encore étrangement. Il essaya de ne pas le relever, et se concentra sur elle. Il se leva et attrapa un torchon propre qu’il mouilla avant de nettoyer l’une des plaies le long de sa tempe qui s’était rouverte. Il sentit Clio se raidir sous ses doigts mais continua à nettoyer lentement la blessure. Elle finit par se détendre et le laissa faire.
- Pourquoi ? murmura Clio la gorge serrée.
- Pourquoi quoi ? demanda Ben
- Tu es aussi gentil ? Tu ne devrais pas…
- Je ne vais pas te laisser seule… Tu es vraiment mal en point.
Clio n’ajouta rien, elle savourait la sensation. On prenait soin d’elle. Sans lui poser de question. Elle n’avait pas ressenti tout ça depuis des années. Sa mère ou son frère tentait toujours de lui soutirer des informations. Informations qu’elle n’avait aucune envie de donner bien évidement. Mais avec Benjamin c’était différent. Pour la première fois depuis des années, elle sentit les larmes lui brûler les yeux. Depuis qu’elle était en âge de se soigner, jamais plus elle n’avait demandé d’aide, voulant à tout prix éviter ces questions : Pourquoi te fait-il ça ? Ne te laisse pas faire ! Pourquoi ne réagis-tu pas ? Tu es une Muse tu pourrais le réduire en cendres ! Elle ne voulait pas entendre ces remarques, elle ne voulait plus inquiéter les autres, elle ravala ses larmes mais quelques-unes avaient dû lui échapper car elle sentit Benjamin s’arrêter.
- Hey…, dit-il en se baissant, je te fais mal ?
- N-Non… je… excuse-moi, je n’ai plus l’habitude.
Benjamin fut choqué, elle n’avait plus l’habitude ?
- Comment ça ? Ton frère ou ta mère ne t’aident pas ?
- Non… je… je le refuse.
Il avait du mal à le concevoir et en même temps le comprenait. Elle avait l’air de ce genre de personne qui ne voulait pas mêler les autres à ses problèmes, qui savait ce que cela leur coutait… Et lui comme un couillon allait se retrouver avec ces problèmes s’il persistait à l’aider. Mais il ne pouvait s’en empêcher.
- Je ne vais pas te demander pourquoi, mais… Si un jour tu as besoin d’en parler tu sais où me trouver.
Clio hocha la tête puis se leva en terminant sa part de pizza et remit le reste au frigo.
- Je vais te laisser… Bonne nuit.
- Mhm… Bonne nuit, dit-il en la regardant s’éloigner. Ben l’observa, elle avait l’air si fragile de dos, elle semblait porter un poids énorme sur ses frêles épaules. Pourtant, elle restait digne et n’en montrait rien. Il ne serait pas rester dormir, il n’aurait surement jamais rien sû de ce que subissait la jeune femme.
Tu le savais… dit une voix sortie de nulle part, obligeamment féminine, il ouvrit les yeux et se redressa cherchant d’où venait cette voix. Tu le sais depuis que vous êtes enfants ce qu’elle subit… murmura à nouveau la voix.
- Qui est là ? demanda Benjamin en fronçant les sourcils, mais personne ne lui répondit.
Benjamin se frotta les yeux. Il était vraiment fatigué pour entendre des voix. Il se recoucha et s’endormit, d’un sommeil agité. Il avait l’impression de revivre des souvenirs d’enfance, cependant dans ces souvenirs il y avait une petite fille qu’il n’avait jamais vu.
« - Comment tu t’appelles toi ?
- J’ai pas envie de te le dire répondit Benjamin,
- Mais je t’ai dit le mien pourtant… »
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